Après une vie mouvementée au milieu d'une période extrêmement turbulente, Eugène Ionesco s'enfuit à nouveau dans les années 1980 - en Suisse, pour affronter ses pensées, ses oppressions et ses angoisses en tant que peintre. La publication bilingue « La main peint / Die Hand malt » donne un aperçu des résultats. Les pixelarts minimalistes présentés ci-dessous rappelent à cette période dans la vie d'Eugène Ionesco.
« Je suis loin d'être seul à dire que le monde est devenu invivable. Les peuples sont en délire. Les hommes ont dépassé les limites même de l'ignoble. Il n'y a plus de choix entre une cause ou l'autre. La terreur généralisée que nous vivons rend les plus sensibles incapables de supporter ce fardeau énorme, … »
« Je n’arrive pas à comprendre comment il se fait que depuis des siècles, des siècles, des siècles les hommes acceptent de vivre ou de mourir dans ces conditions intolérables. Accepter d’exister avec la hantise de la mort, dans la guerre, dans la douleur sans réagir véritablement, hautement, définitivement. Comment l’humanité a-t-elle pu accepter d’être là, jetée là, sans aucune explication. Nous sommes pris dans une sorte de piège collectif et nous ne nous révoltons même pas sérieusement. »
« J’ai l’impression de faire partie de cette majorité silencieuse qui parle, c’est-à-dire que j’ai l’impression d’être, comme vous le dites, quelqu’un qui résiste. J’ai toujours eu la tentation de m’opposer aux affirmations publiques, aux affirmations générales, parce que chaque affirmation que l’on fait est en réalité un slogan. Les idéologues occidentaux qui parlent de lutte de classes, de société idéale ou de dogmes politiques plus précis, ne faisaient qu’emprunter les slogans qui étaient bien formulés et bien pensés et bien répandus. »
« On ne change pas; la situation change. On peut être mis dans des conditions meilleures ou pires, c’est toujours moi qui suis au milieu, le même dans mon essence intime. »